LA GRANDE TERREUR EN URSS 1937-1938

TOMASZ KIZNY - ARCHIVES


Editeur : EDITIONS NOIR SUR BLANC
Année de parution : 2013


L’existence de ce livre m’était connue, comme à un certain nombre de personnes actives dans le milieu de la photo, depuis un certain temps déjà.
La décision de publier ce livre aux éditions Noir sur Blanc m’est apparue comme un évidence dès que mes yeux ont croisé le regard d’Alexis Jeltikov, serrurier dans le métro de Moscou, arrêté le 18 juillet 1937, photographié dans sa prison la veille de son exécution.
Cet homme au regard inoubliable est l’une des 750.000 victimes de la Grande Terreur, victimes jusqu’à présent anonymes.Sur ordre de Staline, en quatorze mois ,toutes ces personnes aux origines sociales très variées ont été "effacées" , leurs familles laissées dans l’ignorance de leur sort, leur existence oblitérée, leur sépulture occultée ou ignorée. C’était sans compter sur l’obstination d’un homme, le photographe polonais Tomasz Kizny qui a mené une longue enquête à la recherche des traces des victimes en sillonnant la Russie de part en part. Ce véritable travail de fourmi , mené avec le soutien actif de l’organisation Mémorial en Russie qui lui a ouvert ses archives, force l’admiration et apporte une pierre fondamentale à l’édifice de la mémoire collective russe. Il restaure enfin leur dignité aux victimes.Presque toutes ont été réhabilitées à partir du dégel khroutchevien pour les premiers ou à la faveur de la pérestroïka pour les derniers. Ces individus ont donc été prononcés innocents et leur dignité et celle de leurs descendants restaurée.Le photographe /auteur a donc vraiment fait œuvre d’historien, car au- delà des images très fortes- les portraits des victimes bien sûr, mais aussi les lieux de sépulture- c’est tout un pan de l’histoire de la Russie qui nous est révélé. L’image devient ici vecteur de connaissance et nous sert de révélateur.Les textes sont également forts qui mettent en lumière l’empressement de certains à dépasser les quotas de victimes pour se faire bien voir des instances dirigeantes du parti. Ce qui ne les sauvera finalement pas de la Terreur qui les dévorera quelques années plus tard.
La parole des descendants prend toute son importance lorsqu’ils disent leur enfance flétrie par l’irruption dans leur vie du vide créé par la disparition d’un parent, par la recherche incessante d’une trace qui se heurte au mur opaque du silence officiel.Un livre essentiel et qu’il est un honneur d’avoir publié.Vera Michalski